3.5.08

Merci Dr. Hofmann !



Le célèbre chimiste suisse Albert Hofmann s'est désincarné le 29 avril à l'âge vénérable de 102 ans, et l'humanité (en particulier les soixante-huitards) lui doit beaucoup !


"Vendredi dernier 16 avril 1943 en plein après-midi, j'ai dû interrompre mon travail au laboratoire et me rendre à mon domicile : en effet, j'ai été pris d'une angoisse étrange en même temps que d'un léger sentiment de vertige. A mon domicile, je me suis allongé et j'ai sombré dans un état second, qui n'était pas désagréable, puisqu'il m'a donné à voir des images fantasmagoriques extrêmement inspirées. J'étais dans un état crépusculaire, les yeux fermés (je trouvais la lumière du jour désagréablement crue), j'étais sous le charme d'images d'une plasticité extraordinaire, sans cesse renouvelées, qui m'offraient un jeu de couleurs d'une richesse kaleïdoscopique. Au bout de deux heures environ, cet état se dissipa". (Albert Hofmann, LSD mon enfant terrible, L'Esprit frappeur, 2003 - originalement publié en 1979, en langue allemande).


Ce sont les termes du rapport que le Dr. Hofmann envoya à son supérieur. Il venait de tester involontairement la molécule qu'il avait synthétisée à partir des alcaloïdes de l'ergot de seigle, le LSD 25 (diéthylamide de l'acide lysergique). Dès le 19 avril, il décida derechef de procéder à une nouvelle auto-expérimentation. Il en conclut que "le LSD était bien une substance psychoactive dotée de qualités extraordinaires. A ma connaissance, aucune substance connue à ce jour ne produisait, à des dosages si infimes, des effets psychiques d'une telle intensité".


Il conclut l'ouvrage sur ces mots : "L'importance spécifique du LSD, je la vois dans la possibilité qu'il offre d'apporter un soutien matériel à toute méditation fondée sur la recherche de l'expérience mystique d'une réalité à la fois plus haute et plus profonde. Cette utilisation correspondrait tout à fait à l'essence et au caractère actif du LSD comme drogue sacrée".


Après être avoir été largement testé en milieu psychiatrique et par l'armée, le LSD devint au cours des années 60 la drogue culte des milieux alternatifs : beat generation, hippies, babas cool, artistes et intellectuels. La démarche psychédélique (révélatrice de l'esprit) était alors un devoir moral. On faisait des "acid trips" et parfois, on n'en revenait pas. Il fallait s'accrocher, mais que de magnifiques expériences psychiques, voire mystiques ont été vécues !


Le docteur en psychologie clinique Timothy Leary, surnommé le pape du LSD, en fut l'un des plus brillants avocats (ce qui lui valut de se retrouver en prison). Sa devise était : "turn on, tune in, drop out !" (branchez-vous, mettez-vous en phase, lâchez prise !). Il voulait dire par là : branchez-vous sur la contre-culture et l'acide, mettez-vous en phase avec la nature et vos vibrations intérieures, laissez tomber la société matérialiste et ses mensonges. Il prônait l'exploration et l'expansion de la conscience. Des dizaines de milliers de jeunes occidentaux découvraient avec ravissement qu'il est possible de vivre autrement, avec comme apothéose les voyages en Inde (en auto-stop et sans un sou en poche, pour la plupart), ainsi que les grands festivals de musique comme Woodstock et Wight. Bien entendu, les autorités finirent par voir d'un mauvais oeil cette déferlante du flower power et le LSD fût peu à peu prohibé dans la plupart des pays.


Ci-dessous, deux extraits significatifs de son ouvrage, Timothy Leary, La Politique de l'extase, Fayard 1973.


"Le LSD nous branche sur Dieu


Le fait que le LSD produise l'extase et une rapide guérison était probablement une raison suffisante pour qu'il fût banni en Amérique, mais il allait surgir de nouvelles données qui augmenteraient l'opposition médicale. Il apparaissait en effet de façon évidente que les drogues psychédéliques provoquaient des expériences religieuses. Horreur ! Dans l'étude de Savage, 90% des sujets firent état d'"une plus grande connaissance de Dieu ou d'un pouvoir supérieur". "Les drogues provoquent la fin de la quête du Christ pour atteindre directement le Saint Esprit", fut le commentaire paradoxal de Theodore Gill, président du Séminaire de Théologie presbytérienne de San Francisco."


"Branchez-vous ou éjectez-vous en parachute


Le danger du LSD n'est ni physique ni psychologique, mais socio-politique. Ne vous y trompez pas : l'effet des drogues d'expansion de la conscience finira par transformer nos conceptions de la nature humaine, des capacités humaines et de l'existence. Mesdames et messieurs, le jeu va changer. L'homme est sur le point d'utiliser enfin ce fabuleux réseau électrique que recèle son crâne. Les institutions sociales actuelles feraient mieux de se préparer au changement. Nos concepts favoris barrent la route à une marée montante de deux millions d'années. La digue verbale s'écroule. Cap sur les collines, ou préparez votre bateau intellectuel à naviguer avec le courant."


métadonnées : cognition, tendances, visions, zarbi

30.4.08

Mirages himalayens

"Tout le drame de notre époque est là : on ignore des faits sous prétexte de défendre des valeurs." Claude Lévi-Strauss.

Ce mois d'avril aura été riche d'enseignements sur la manière dont fonctionnent désormais nos sociétés surmédiatisées. Certains événements sont mis en exergue, reformatés et répétés jusqu'à saturation, afin de conditionner l'opinion et détourner l'attention du public d'autres phénomènes qui se déroulent en parallèle et qui mériteraient qu'on s'y attarde. Ainsi, tandis que l'effet dévastateur de la crise financière mondiale et de la hausse du prix du carburant et des denrées alimentaires de base se fait déjà durement sentir dans une trentaine de pays, que les émeutes de la faim se propagent et sont souvent réprimées dans le sang, les politiques et les journalistes se demandent, la bouche en coeur, s'il convient ou non d'assister à la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Pékin !

Le fond de l'affaire tibétaine c'est qu'il n'y a pas d'affaire, ou plutôt qu'elle n'est qu'un écran de fumée servant de prétexte à certains lobbies pour tenter de bouger leurs pions sur l'échiquier d'intérêts géostratégiques. Un consensus international existe sur cette question depuis une cinquantaine d'années en faveur du statu quo, à savoir le maintien du Tibet dans le cadre de la nation chinoise. Le Dalaï lama lui-même ne revendique pas l'indépendance du Tibet (ni même le boycott des Jeux Olympiques). A ce propos, il n'est peut-être pas inutile d'expliquer à nos zélateurs de la démocratie que Sa Sainteté Tenzin Gyatso n'est pas un délégué choisi par le peuple tibétain, et que s'il est considéré par certains comme le "chef du gouvernement tibétain en exil", c'est à titre de réincarnation en tant que 14ème dalaï lama ! Encore faut-il préciser que cette dignité, attribuée pour la première fois par un chef mongol à l'abbé du monastère de Drepung en 1578, s'adresse exclusivement au principal du clan Gelugpa, dit "Bonnets Jaunes". Voilà qui réduit déjà considérablement le champ d'une représentativité fantasmée par les occidentaux. On ne peut que regretter que dans le concert de louanges à l'égard du saint homme aucune place ne soit laissée aux historiens et aux spécialistes du lamaïsme tibétain. La monopolisation du temps de parole par des personnalités peu enclines à la rationalité et peu regardantes quant à l'exactitude de leur propos, souligne assez qu'on s'ingénie à éluder les vraies questions en leur opposant des clichés oratoires comme la paix universelle ou le génocide culturel. Nous ne retiendrons que deux exemples de désinformation assez éloquents : le moine Matthieu Ricard, traducteur français du DL, s'exprimant sur une chaîne française, tandis qu'on voyait en arrière-plan des policiers népalais réprimant une manifestation de moines. Ou encore cette scène qui a fait le tour du monde, montrant des soldats chinois tenant des robes de moines pliées et qui s'est avérée dater d'un film tourné en 2003, où des soldats faisaient office de figurants.

De toute cette frénésie médiatique ne ressort aucune vue d'ensemble, aucune analyse de fond ou mise en perspective n'est proposée. L'accent est toujours porté, volontairement ou non, sur une infime partie du tableau, un point de détail qui se trouve propulsé sur le devant de la scène dans un effet de loupe vertigineux. Mais cet abus du procédé du zoom, censé véhiculer des contenus subliminaux en direction d'un public hypnotisé se retourne parfois contre les envoyeurs, non sans une certaine ironie. Ainsi, cette banderole brandie en Chine après le passage agité de la flamme olympique à Paris affiche un message sans ambiguïté : Intéressez-vous à vos propres minorités, vous n'êtes pas habilités à nous faire la leçon !

En effet, dans ce dossier tout peut devenir une arme à double tranchant, chaque argument peut être démonté et renvoyé comme un boomerang à son auteur. Plusieurs niveaux de lecture sont applicables à cette question, mais chaque entrée débouche sur des liens macropolitiques inattendus et des pièges sémantiques. S'agissant de la survie d'une minorité ethnique et de sa culture, on ne peut que déplorer le fait que toutes les minorités culturelles et linguistiques de par le monde soient actuellement confrontées à la globalisation des échanges et à la dilution de leurs particularismes. Par ailleurs, nul ne peut contester que la langue tibétaine soit enseignée dès l'école primaire, et que les ethnies minoritaires de Chine sont légalement exemptées de l'obligation de l'enfant unique. S'agissant de la pratique de la religion bouddhiste, c'est un faux problème, le bouddhisme ayant été introduit en Chine bien avant qu'il ne le fût au Tibet et qu'il y est toujours pratiqué, à l'instar d'autres religions. A y regarder de plus près, la plupart des revendications en faveur de l'autonomie tibétaine sont infondées ou construites sur des raisonnements fallacieux. Le seul argument objectivement irréfutable (toujours laissé de côté avec une grande délicatesse) consisterait à invoquer le fait que le Tibet abrite la source des plus grands fleuves d'Asie et que son territoire recèle d'immenses richesses minérales (pétrole, or, gaz naturel, charbon, etc).

Après lancement d'un ballon d'essai médiatique gonflé d'approximations, d'exagérations et d'informations tronquées, pour ne pas dire truquées, suivi de quelques gesticulations spectaculaires, on peut donc s'attendre à ce que le thème complexe du Tibet soit évacué des feux de l'actualité pour se retrouver à nouveau dans le seul champ de vision des stratèges occultes qui s'efforcent d'influencer le jeu à leur avantage.


métadonnées : analyse critique, tibétomanie

24.4.08

Nuages de bon augure

(Kronik du chat)





Je tien za prézenté ofisielman mé kompliman danivérsér a mon fidél animal de kompani Altokumulus !
Sé pa son vré nom., él se kach sou zun pseudo kar dans le web 2.0 il fô avoir lér mistérieu si on veu pa passé pour un ringar.

Je rekoné en toute modesti ke je sui son éminens griz. Cé moi ki tir lé fisel dans lombre. Je doi toujour la rekadré. Ya du boulo !

Ne le répété pa : sé moi ki lui inspir lé zidé lumineuz de son blog. Kel talan et kel erudission ... De tan zan tan je me poz devan lékran é je la fiks pour lipnotizé (sa march a tou lé kou, je sui tro for). Alor él se lèv tou ténérvé é me sér un bol de bouf.

Je kontrol tou sinon sé nimport koi. Je vou pri de kroir ke sé un job a plin tan, jé pa le tan de me repozé.
Ce soir sé la fiesta. Sé moi ki vé dégusté lé krevet pandan kél aval son rizoto é sa tart opom, vu kél é VG. Beurk !

Post skriptum : Vou zoré san dout remarké ke jutiliz dézormé un cachet pour sinié mé sélébr Kronik, a la manière dé gran mandarin du tan jadis. Fô se ki fô !





métadonnées : kronik du chat

22.4.08

Google se met au vert !





Logo très réussi pour l'équinoxe du printemps, à l'occasion de la Journée de la Terre 2008 !


Et pour tous les admirateurs de la nature, voici une autre nouvelle réjouissante :

03:58 18.04.2008

Le plus vieil arbre du monde, près de 10.000 ans, vit en Suède

Le plus vieil arbre du monde toujours en vie est un sapin âgé de 9550 ans. Il a été découvert en Suède par des chercheurs, a annoncé l'Université d'Umeaa."Cette découverte fascinante a été faite sur le mont Fulu dans le Dalara", dans le centre de la Suède, a indiqué un communiqué de l'université suédoise.
"C'est une grande surprise car nous pensions que ce type de sapins n'avait poussé dans ces régions que tardivement", a déclaré le professeur Leif Kullman qui fait partie de l'équipe de chercheurs de l'université d'Umeaa.
Auparavant, les scientifiques estimaient que les arbres les plus âgés, des sapins, remontaient à 4000 ou 5000 ans et se trouvaient en Amérique du nord.
Le plus vieil arbre du monde répertorié a été découvert en 2004 alors que les chercheurs suédois effectuaient un recensement des espèces dans cette région, a précisé le professeur Kullman. Une datation au carbone 14 a été faite dans un laboratoire de Miami en Floride.
"Cela bouleverse nos théories", a ajouté M. Kullman pour qui cette découverte devrait permettre d'aider à mieux comprendre le changement climatique.
(ats)

métadonnées : rapport de plongée, tendances

20.4.08

L'envol du Dragon












NESSIE & Co.
Peinture à l'huile, 2000
Andreas SCHREYER











(détail)

métadonnées : visions.

13.4.08

L'empire contre-attaque


Séquence mise à niveau :
Voici l'un des quelques 1700 commentaires laissés à cette heure sur le blog de Jean-Luc Mélanchon, à la suite de son article intitulé "Je ne suis pas d'accord avec le boycott des jeux de Pekin et la propagande anti chinoise".
Rien à ajouter. Une petite leçon de civilisation, respect !

Un étudiant Chinois dit:
9 avril 2008 à 10:51

Dans cette campagne de désinformation des faits et de diabolisation de la Chine, nous, les étudiants chinois à l’étranger, nous sentons très mal.
Une presse qui était un modèle pour nous, pour l’avenir de la Chine, ne l’est plus. L’opinion publique n’est pas à manipuler. C’est une autre forme de censure dans “un système de presse libre”.
Et la paresse intellectuelle des français, surtout la classe politique, qui est ‘élite française, et leurs confiances absolues à la presse, ressemblant aux pas mal de chinois, nous étonne.
Une méfiance, une hostilité du peuple chinois est en train de grandir.
Le gouvernement chinois est loin d’être parfait, mais notre génération, nous, les jeunes de 20-30 ans, nous vivons depuis notre enfance pleinement l’amélioration de niveau de vie et l’évolution de la liberté en Chine.
Nous sommes étonnés, c’est au moment que tout va dans le bon sens, que nous vivons mieux qu’avant, à ce moment, qu’il y a plus de monde à l’extérieur qui veulent nous “sauver” de la “plus grande dictature du monde”…… Où étiez-vous avant?
Nous, les jeunes de Chine, les plus occidentaux de la Chine, nous avons plein de confiance en avenir. Ce gouvernement actuel, la quatrième génération depuis 1949, est arrivé au pouvoir depuis 5 ans, ils nous a convaincu avec sa volonté de changement, d’évolution. Nous avons confiance.
La Chine a une autre culture, une autre Histoire. La sociologie n’est pas une science exacte comme la mathématique, il y a trop de variables pour arriver à un “modèle universel” dans cette matière.
Les chinois évoluent, la Chine évolue, même le parti communiste évolue, les vieux conservateurs communistes sont et seront en retraite, les jeunes dirigeants sont beaucoup plus ouverts et pragmatiques. Laissons nous le temps, laissons l’évolution de la Chine à nous, les jeunes étudiants chinois à l’étranger, qui porteront les bons éléments du système occidental en Chine.
La vision de la Chine de l’extérieure devrait évoluer aussi, nous avons l’impression que le monde occidental regarde la Chine avec toujours une vision des 80s. Sauf que la Chine évoluent tellement vite, que le repère du passé a été même abandonné par les jeunes chinois.
Allez en Chine, pour voir une Chine réelle complète, pour se faire une opinion, allez au Tibet, pour constater avec vos propres yeux la “génocide culturelle”, si la langue tibétaine est en disparition, si les moines sont libre de pratiquer leur croyance, si les tibétains vivent mieux. Discutez avec les tibétains âgés, de leur inoubliable “paradis du bouddhisme”.
Oui, la Chine a beaucoup de problème, nous, les chinois, nous sommes plus confiants que jamais pour les résoudre.
Nous avons l’impression, que ce qui dérange n’est pas les problème des chinois en Chine, mais la Chine, en tant qu’une nouvelle puissance, en tant que une nation qui influence le monde, en tant qu’un pôle de pouvoir qui réclame le partage des intérêts politiques et économiques aux vielles puissances.
La Chine et sa culture est pour moi pacifique, son Histoire montre qu’elle était envahit sans cesse par les peuples extérieures, et en suite,les envahisseurs sont devenus, presque tous une partie de la Chine.
Je pense que c’est là la grandeur d’une culture de 5000 ans. Inquiétant? Peut être, mais la culture est vivante. Quand vous utilisez les baguettes dans les restaurants chinois ou asiatiques en général, la culture chinoise vous ouvre pleinement ses bras.
La diabolisation de la Chine va éloigner les chinois de l’Occident, va éloigner la distance entre les peuples.
Communiquons!
Je salue au nom des étudiants chinois en France, au nom de ma famille en Chine, le courage et la conscience de Monsieur Mélenchon!



métadonnées : rapport de plongée, tendances, tibétomanie

12.4.08

Imbroglio tibetain

Il est assez navrant de constater qu'une fois de plus l'opinion occidentale s'engouffre tête baissée dans un leurre médiatique, qui a cette fois-ci la forme d'une gueule de dragon. D'autant que cette soudaine et fulgurante sympathie pour la cause tibétaine semble opportunément se transformer en une croisade anti-chinoise, teintée d'une pernicieuse xénophobie. Après cinquante-huit ans de présence chinoise au Tibet, il suffit pourtant d'ouvrir un dictionnaire pour comprendre que les relations sino-tibétaines ont déjà connu de nombreux rebondissements au cours des siècles, dont l'avant-dernier remonte à 1912 : les britanniques s'étaient alors alliés aux tibétains pour bouter les chinois hors du Tibet, que les empereurs Qing avaient conquis en 1751 !

Il serait également trop facile de passer sous silence le fait que lorsque les chinois sont entrés à Lhassa en 1949, la population était soumise à l'autorité féodale des monastères et de l'aristocratie, taillable et corvéable à merci, maintenue dans un état de sujétion par les châtiments corporels, la superstition et les pratiques magico-chamaniques issues du Bön. Rappelons que le servage et le système discriminatoire des castes ont été abolis au Tibet en 1956, par l'administration chinoise. L'image d'un jardin d'éden himalayen est avant tout une invention littéraire occidentale, peu conforme à la réalité historique.
L'affaire n'est donc pas aussi simple que certains voudraient nous la faire miroiter. Le sénateur français Jean-Luc Mélanchon, nous en livre une pertinente analyse historique et politique sur son blog.

Par ailleurs, tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin au bouddhisme ne pourront qu'être gênés en entendant certains porte-parole des moines se revendiquer d'une "identité" et d'une "culture", sachant que la philosophie bouddhiste s'emploie précisément à déconstruire les conditionnements et les illusions découlant de l'identification aux phénomènes. Y aurait-il tromperie sur la marchandise qu'on essaie de vendre aux naïfs occidentaux, peu enclins aux subtilités métaphysiques ?
L'intéressant ouvrage L'ombre du dalaï lama des époux Trimondi, deux historiens allemands extrêmement bien documentés, constitue d'ores et déjà une référence incontournable pour l'étude du lamaïsme et de la culture tibétaine. Il a fait grand bruit en Allemagne et aux USA, mais n'a toujours pas été publié en France, ce qui pourrait expliquer partiellement la désinformation du public.

Les citoyens des pays dits démocratiques ont en principe le droit d'aller manifester dans la rue. Ont-ils aussi le droit de s'instruire, de vérifier leurs sources, de lire les étiquettes "made in China" sur leurs vêtements et leurs aliments, et le cas échéant, décider en toute autonomie de ne pas en faire l'achat ? Ont-ils encore le droit d'exercer librement leur jugement sans être influencés par la pression des médias ? On aimerait le croire, car si la démocratie ne devait plus consister qu'à vociférer sur commande des slogans préformatés, cela ressemblerait fort à du totalitarisme.
Du moins n'est-il pas interdit d'esquisser l'ébauche d'un sourire devant le propos désarmant d'un manifestant à San Francisco : "Spontanément, l'univers est en train de s'ouvrir à cette question."

Spontanément, vraiment ?

métadonnées : conspiration, rapport de plongée, tendances, tibétomanie

9.4.08

Chinoiseries (kronik du chat)

El menerv - veu toujour ekouté lé déba politik ou tou le mond sangueul - menpech de médité trankil.
O jeuzolimpik de pekin mangé du chien ...
Mé jaim bien lé chinoi il son tré malin et tré rafiné. Voisi 1 de leur proverb fameu :

"Le fromaj gratui ne se trouv ke dans lé sourisièr"
alor a bon antandeur salu !

Sa veu dir balayé ché vou lé kaméra de surveyans, lé paspor biométrik é lé manipulassion médiatik avan de kritiké lampir du Milieu ...


métadonnées : kronik du chat, tendances

29.3.08

Le miroir de l'esprit (II)

Quand la réalité devient trop lourde à gérer, l'esprit n'a pas son pareil pour imaginer des stratégies de repli. Après avoir exploité la planète de manière inconsidérée, l'humanité croit entrevoir une lueur d'espoir dans les technologies d'avant-garde (nano, génétique, bio-informatique). Elle ne se fait en tous cas pas prier pour prendre refuge dans le web, qui lui apparait comme une sorte de cocon expérimental, d'où elle pourrait attendre en toute quiétude une éventuelle métamorphose. On ne peut dès lors que constater l'exode massif vers cet univers séduisant, où tout paraît encore possible : personnes privées et entreprises jouent des coudes pour y installer leur petit commerce et y déménager leurs relations et leurs centres d'intérêt. Les simulations de Second Life cherchent à nous persuader que les activités virtuelles sont bien plus passionnantes et plus enrichissantes que le contexte trivial du quotidien. Il se trouve même quelques gurus pour affirmer qu'au 21ème siècle on ne peut plus prétendre à la moindre crédibilité sans s'afficher sur internet, point à la ligne. Toutefois, en oubliant systématiquement d'en évoquer un corollaire logique (juste le genre de petit détail qui déchire un peu), ils ne se présentent pas en visionnaires éclairés ni en bienfaiteurs de l'humanité. Il est pourtant à la portée du premier venu de s'aviser qu'une vulgaire panne d'électricité cascadée (sans même faire allusion aux crash de serveurs relevant de facteurs accidentels ou intentionnels) serait en mesure d'envoyer tout l'ingénieux dispositif valser dans le néant. Ah! nous sommes bien peu de chose, ma bonne dame ... Envisagé sous un angle philosophique, un tel événement ne serait à rater sous aucun prétexte pour quiconque voudrait approfondir sa compréhension des phénomènes d'apparition et de disparition !

Toujours est-il qu'englué dans les problèmes qu'il a lui-même suscités, déprimé par un horizon obstrué et sentant sa vitalité s'étioler, l'homo sapiens aspire surtout à hiberner en attendant le retour du printemps. A défaut de trouver des portes de sortie, il a su aménager une tanière abstraite, une excroissance mentale dans laquelle il peut s'insinuer et se lover. Sa pensée se coule dans le cyberespace, jonglant avec les apparences, s'amusant à projeter des configurations paradoxales et à élaborer des ensembles conceptuels inédits. Son esprit peut y jouer comme un magicien s'enchantant de ses propres sortilèges, enfin délivré des contingences physiques. Dans les méandres du web les fantasmes les plus extravagants deviennent possibles, l'individu peut exister tel qu'il se voit ou tel qu'il se rêve, sans être réfréné par le filtre des conventions. Reprenant goût à la vie, la chenille devient papillon, le bourgeon devient liane - la conscience étire ses branches et ses ramifications dans une dimension désormais libérée de la gravité. Comme les palétuviers dans la mangrove, les esprits se faufilent dans toutes les directions pour s'enchevêtrer les uns aux autres ...

Et tandis que les internautes sont occupés à explorer le versant végétal de leur psychisme, le jardinier n'est pas bien loin, veillant avec sollicitude sur les allées (et les venues). Les Petit Poucet du net sèment à leur insu des kilos de gravier virtuel. A chaque connexion, ils se font discrètement prendre en filature, à chaque embranchement leurs choix sont dûment relayés. Des mots-clés spécifiques leur sont personnellement assignés et, privilège insigne, aimablement proposés par messire Google, le roi du sac à malices. Insidieusement, l'espace de liberté et de créativité devient normatif, le partage spontané des données tend à devenir un système en faisceaux (flux RSS, Atom), le treillage innocent devient treillis. Les sens interdits poussent comme les champignons, les clairières mystérieuses se transforment en zones de pique-nique et les chemins de traverse deviennent des voies à péage. La forêt profonde du web serait-elle destinée à être quadrillée comme un parcours de golf ? Peu vraisemblable, direz-vous ...
Une légende urbaine raconte pourtant que l'on élague déjà les arbres qui dépassent ... ou les sites qui dérangent.

Pierre Chapignac, analyste de l'impact des nouvelles technologies, donne un aperçu de la situation qui laisse pour le moins songeur et pourrait procurer quelques frissons aux âmes sensibles :

Le visage avenant du soft power ne doit pas nous faire perdre de vue que la clé du pouvoir réside désormais dans le contrôle des consciences et qu'à ce titre, le web peut aussi être une arme redoutable..

métadonnées : cognition, légende urbaine, tendances, web sémantique

4.3.08

Le miroir de l'esprit (I)

Au fil des années, Internet est devenu un gigantesque réservoir virtuel reflétant l'activité des cerveaux humains en temps réel. Contrairement à ce l'on peut entendre ici ou là, il n'est pas question d'une bibliothèque colossale où pourraient être recensés tous les savoirs. Le web est bien trop fluctuant et trop aléatoire pour prétendre à ce statut. En pratique, il s'agit plus d'enregistrer des configurations mentales et des représentations éphémères que des connaissances, lesquelles sont d'autant plus sujettes à caution sur le net qu'il est impossible d'en vérifier la source. Cet entonnoir fantomatique flottant à mi-chemin entre le réel et l'iréel avale sans discernement les rebondissements de l'actualité et les manifestations périodiques de consciences éparpillées à la surface de la planète. Désormais, toute production de l'esprit qui se respecte se doit d'être traduite en langage balisé et basculée séance tenante dans la dimension numérique, pour y être identifiée par les puissants algorithmes des spiders. Dans un troublant effet de mode la moindre contribution, aussi futile soit-elle, aspire frénétiquement à être acheminée vers cette vitrine illusoire, oscillant entre formulation et désintégration. Sitôt mise en ligne, l'information est noyée dans le magma sémantique, avec l'espoir pathétique de rester en surface et d'apparaître dans les résultats des moteurs de recherche.

"Hippocampe" de Salvatore di Giovanna

En dehors d'un jouet passionnant, énorme capteur d'énergie mentale, quel rôle attribuons-nous au web ? Est-ce un ballon d'essai, une bulle narcissique ou une bouteille à la mer, confectionnée à la hâte par une espèce humaine qui se sait en voie de disparition ? Ou encore, comme le prétendent certains, l'étape ultime avant la prise de contrôle par l'intelligence artificielle ? On peut y lire en tout cas deux tendances significatives et plutôt complémentaires, sinon antagonistes : d'une part le web marchand et "officiel" qui prétend afficher clairement ses objectifs, de l'autre un web "underground", comprenant ces millions de blogs personnels qui attisent la curiosité des moteurs de recherche. Preuve en sont les nouveaux outils sémantiques qui, à l'instar d'OWL (Web Ontology Language) s'efforcent de tracer le contenu conceptuel des pages.
Une fois de plus, l'utilisateur se sent rassuré. Il est libre de mettre en ligne sa singularité, de créer les liens qu'il juge pertinents et d'appliquer à ses contenus les tags ou mots-clés qui lui conviennent. Il est donc le prescripteur et le descripteur de ses interventions. Mais quel en est finalement l'interprète ?

métadonnées : cognition, recherche, web sémantique

19.2.08

L'art du brouillage

Qu'il s'agisse de protéger des données sensibles ou de passer inaperçu, il peut s'avérer fort utile de pouvoir disposer d'une belle nappe de brouillard, permettant de vaquer à ses activités à l'abri des regards indiscrets. A vrai dire, les cas de figure où cette application peut rendre d'inestimables services ne manquent pas.
Imaginons que vous croisiez un collègue dans la rue, alors que vous êtes supposé être au lit avec une forte fièvre. Un petit spray de brouillard et l'affaire est réglée !
Vous pourriez aussi souhaiter échapper pendant quelques heures à la vigilance des moteurs de recherche pour des motifs plus ou moins avouables. Or les ordinateurs, c'est bien connu, sont incapables de se repérer dans le brouillard !
Voici donc la formule magique du brouillard. Nous vous conseillons cependant d'effectuer quelques exercices pratiques avant de vous livrer à des opérations en grandeur réelle. N'oubliez pas qu'un brouillage habilement distribué vaut tous les cryptages ... à bon entendeur, salut !


métadonnées : zarbi

14.2.08

W3C : l'effet dark design

Qui se cache réellement derrière le consortium industriel World Wide Web ?
Se présentant lui-même comme ayant été créé pour "mener le Web à son plein potentiel en développant des protocoles communs qui facilitent son évolution et assurent son interopérabilité", le W3C est un club très opaque. Parmi les "services" qu'il propose, il y a "la mise en place de diverses applications prototypes visant à démontrer l'utilisation des nouvelles technologies et la mise en oeuvre de logiciels permettant d'incorporer et de promouvoir les standards". C'est ce dernier point qu'il convient d'examiner avec la plus grande attention : en effet, sous le label trompeur de "recommandations", le W3C ne fait que dicter ses propres normes à tous les développeurs et webdesigners de la planète.

Maintenant, respirez un bon coup, et supposez l'espace d'un instant qu'ils sont déjà parmi nous ...
Leur mode de pensée, leurs motivations et leur véritable identité relèvent largement du domaine spéculatif. On peut cependant présumer qu'ils rencontrent certaines difficultés à apréhender nos comportements impulsifs, notre émotivité et nos modèles culturels hétéroclites. Pour des motifs qui nous échappent (ou peut-être pas !), ils ont entrepris une analyse systématique de nos processus cognitifs. Afin de réaliser ce vaste projet, ils se constituent en consortium occulte, créent le web et nous l'offrent comme nouveau terrain de jeux. Naïvement persuadés que cet espace est fait à notre mesure, nous y exposons jour après jour notre monde intérieur et y laissons en toute bonne foi des traces aussi repérables que des rails de chemin de fer. Sans y être contraints, nous dévoilons avec complaisance nos mécanismes psychiques et mettons beaucoup d'entrain à déployer toutes les modalités des passions qui nous animent :
  • la curiosité (je cherche, j'apprends, je fais émerger de nouvelles connexions cognitives)
  • le jeu (je me mets en état de cohérence quantique)
  • la créativité (je développe des concepts originaux)
  • l'exhibitionisme (j'attire l'attention)
  • la compétitivité (je me crois plus malin que les autres)
  • la cupidité (et si j'ajoutais une bannière publicitaire, si j'ouvrais un site de poker ou de tarots en ligne ?)
  • l'humour (mieux vaut en rire qu'en pleurer)
  • les pulsions destructrices (hacking & cracking de type black hat, spam, sexe non consenti, contrôle malveillant, etc.)
  • la sauvegarde de l'intérêt général (hacking & cracking de type white hat, logiciels gratuits (non piégés), didacticiels, partage de fichiers, mises en garde, etc.)
  • la paranoïa (conspiration, sécurité, anti-virus, pare-feu, etc.).

Bref, ce que nous prenons pour un parc d'attractions illimité et interactif n'est que la face apparente d'un laboratoire d'études à l'échelle planétaire. Notons en outre que les expérimentations se font dans les meilleures conditions possibles et sans aucune cruauté, puisque les sujets sont tous volontaires (bien qu'ignorants des enjeux supérieurs de l'opération).

Et la vie continue, avec ses hauts et ses bas. Jusqu'à ce jour où, débordant d'inspiration, vous voulez vous connecter à votre blog pour y noter quelques réflexions philosophiques de haut vol ... et vous chutez de haut : Access denied ! user : unknown, password : wrong !

Après plusieurs tentatives infructueuses votre hypertension prend l'ascenseur, mais vous parvenez à vous maîtriser suffisamment pour taper l'URL de votre blog dans la fenêtre du navigateur. Et là, vous vous mettez à rire doucement et vous vous versez un double scotch. Vous avez enfin compris !

Les idéogrammes d'une écriture non humaine défilent sur le fond d'écran, habillé d'une couleur inconnue. D'incompréhensibles géométries se forment et se déforment sur vos rétines. Une langue étrangère commence à s'insinuer dans votre cerveau et vous délivre par paquets des informations de niveau métaconceptuel. Avec lenteur et comme à contrecoeur, vous commencez à identifier des schémas (pattern recognition) et vous vous mettez à déchiffrer maladroitement. Vous avez besoin d'un autre verre ...

métadonnées : cognition, conspiration, zarbi

12.2.08

L'ivresse des profondeurs

Le professeur Riichiro Mizoguchi de l'université d'Osaka déclarait en 2004 à propos de l'ingénierie ontologique :

Le caractère "profond" signifie près de la "conceptualistaion fondamentale". Tourefois, il faut noter que la question - est-ce profond ? n'est pas une question appropriée. Il faut plutôt se demander : - existe-t-il quelque chose de plus profond ? La raison en est que le concept "profond" est relatif par sa nature. Une connaissance plus profonde explique pourquoi une connaissance de surface est plus "de surface", et explique également des phénomènes plus larges que la connaissance de surface ne peut le faire. En d'autres termes, "plus profond" signifie "plus près de l'essence". Les propriétés essentielles d'une chose sont le coeur de la conceptualisation ontologique. Par conséquent, plus cette conceptualisation est "profonde", plus elle est ontologique.

Cette définition permet de voir émerger les contours de certains aspects idéologiques du web sémantique. L'ordinateur n'étant pas en mesure de lire dans l'esprit humain, on crée des conditions telles que les humains livrent volontairement leurs pensées les plus intimes, sous une forme qui pourra être interprétée en langage informatique. D'où la multiplication de forums, de services de blogs gratuits, de réseaux relationnels, d'encyclopédies participatives du type Wikipedia, etc. Dans ce processus de révélation consentie, le web commercial ne représente que l'écume des vagues. Ce que recherchent en réalité les concepteurs d'ontologies et les développeurs de langages ontologiques c'est de comprendre les processus mêmes de la conscience, afin de pouvoir à terme les transférer à l'ordinateur. En définitive, les ontologies sont des transférables.

Mais que cela ne nous décourage pas de revenir à notre blog comme le fumeur d'opium à sa pipe, pour enregistrer les détours complexes de notre pensée. Ce n'est pas demain matin que l'ordinateur maîtrisera l'art de lire entre les lignes !
métadonnées : cognition, macrosémantique, ontologies, web sémantique

11.2.08

Jargon technocratique

Cette idée de piquer le concept d'ontologie à la philosophie pour en revêtir l'ingéniérie de l'intelligence artificielle est vraiment géniale.
Joli coup double : d'abord le roi est nu. Le philosophe grelotte, abandonné de tous, blessé dans son âme. Et surtout, le technicien de l'information et le mage des sciences cognitives se trouvent soudain auréolés d'un regain de respectabilité et de mystère. Il était temps : tout le monde ou presque pouvait ouvrir son blog, télécharger des fichiers sans passer à la caisse, voire devenir hacker ... ça ne pouvait plus durer.
Il convient maintenant de canaliser tous ces débordements, de modéliser les enthousiasmes et de récupérer les bons plans. La récréation est finie, nous passons à la vitesse supérieure (le web3, soit dit en passant). Après la démo, on va passer aux choses sérieuses - ou du moins, faire semblant.